Dans la routine de Benjamin Glyn Phillips

Dans la routine de Benjamin Glyn Phillips

Entretiens

Photos Alastair Nicol

Texte Matthieu Morge-Zucconi

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L'assistant manager de la boutique Drake's parle produits visage, vêtements et comment le jiu-jitsu a changé sa vie.

“J’aime sourire car j’ai des dents en or, donc je les montre un peu !” Souriant (et montrant un peu de ses dents en or) lorsqu’il ouvre la porte, Benjamin Glyn Phillips nous accueille dans son chaleureux salon par un jour ensoleillé à Walthamstow, dans le nord de Londres. Avec du jazz en fond sonore, l’assistant manager de la boutique Drake’s (une marque qui a commencé par fabriquer des cravates avant de devenir une référence du style élégant naturel) s’est assis pour parler de ses produits visage favoris, de sa passion pour les vêtements (ce jour-là, il porte des mocassins Gucci, une cravate tricotée et un blazer bleu marine à épaule souple), et comment le jiu-jitsu brésilien a changé sa vie.

Bonjour Ben, merci de nous accueillir aujourd’hui ! Est-ce que tu peux te présenter pour nos lecteurs ?

Je suis Ben Phillips, j’ai 40 ans. Je suis l’assistant manager de la boutique Drake’s sur Clifford Street. Je travaille avec Drake’s depuis 1 an et demi.

Avant de commencer à travailler pour Drake’s, que faisais-tu ?

Je travaillais dans l’industrie du tatouage. Je possédais un salon de tatouage à Swansea appelé Swansea Tattoo Company. Cela a duré 6 ans. Avant ça, j’avais une entreprise qui vendait des fournitures pour les salons de tatouages : je vendais des encres, des machines, tout ça. J’ai travaillé dans l’industrie du tatouage pendant quasiment quinze ans.

Comment es-tu passé de l’industrie du tatouage à celle du vêtement ?

J’avais déjà travaillé dans le vêtement auparavant, et j’ai toujours eu un amour et une passion du vêtement. Le bail de notre salon de tatouage arrivait à sa fin, et je ressentais l’envie de changer de direction. J’étais un peu désenchanté par ce que l’industrie du tatouage était devenue, car elle avait beaucoup changé. Je voulais simplement quelque chose de nouveau. Tu sais, je ne suis bon qu’à quatre choses. La première, c’est le tatouage, et je pense que je suis allé aussi loin que je pouvais puisque je ne suis pas un tatoueur, même si j’ai eu la chance de travailler dans cette industrie longtemps. La seconde, c’est me battre, mais je ne suis pas assez bon pour faire de l’argent avec ça. Je suis également calé en musique, mais il n’y a plus d’argent dans la musique. La dernière chose que je connais, ce sont les vêtements. C’était le choix évident. Sans compter que ma femme était très motivée à l’idée de retourner à Londres après 6 ans difficiles au Pays de Galles !

D’où vient ta passion pour les vêtements ?

J’ai toujours été intéressé par les vêtements, depuis que je suis enfant. Je voulais une certaine paire de baskets, bien sûr plus chère que les autres, c’est toujours comme ça ! Tous mes amis avaient des survêtements Nike, mais je voulais un survêtement Air Jordan, ce qui est assez ridicule quand on y pense, mais c’était simplement comme ça. J’ai toujours été très attiré par ça. J’adorais ce qui se passait au Japon par exemple, j’étais un grand fan de A Bathing Ape quand c’est sorti. Je pense que les premières collections sont parmi les meilleures choses jamais faites. J’ai eu la chance de devenir ami avec un mec qui s’appelle Kei Hemmi, qui a une marque qui s’appelle Time Worn Clothing au Japon. Et j’ai eu beaucoup de chance de travailler avec Michael Hill chez Drake’s. Pour moi, lui et Kei sont deux des personnes les mieux habillées que je connais. Ils sont tous les deux géniaux, et je ne les ai jamais vus faire d’erreur !

Comment s’organise ta matinée ?

Je me réveille plutôt tôt, vers 5h00, 5h30. Je fais les choses habituelles : je prends une douche, lave mon visage. En ce moment, je suis très impressionné par vos produits. L’exfoliant, le nettoyant, l’hydratant… Ma peau a tendance à être sèche, surtout sur le visage, et ces produits m’ont aidé. On va croire que j’en fais trop, mais quand les gens te disent “tu as l’air différent, tu as bonne mine” et les seules choses que j’ai changées sont les produits que j’utilise, ça veut tout dire… Ces trois produits, je sais que je les utiliserai pour le restant de mes jours ! J’ai peur de les voir se vider ! Ils sont tellement bien. Ma femme est make-up artist donc dès que je ramène un produit à la maison, elle regarde la composition. Elle a regardé les produits Horace, et a dit qu’ils étaient vraiment bons ! Elle a volé ma pochette voyage, aussi. Avant ça, j’utilisais beaucoup de produits Santa Maria Novella. J’aime les choses qui ont une histoire. Mon parfum, c’est soit Tabacco Toscano de Santa Maria Novella, soit Royal Bay Rum, selon mon humeur. Quand j’étais plus jeune, c’était Brut ou Old Spice ! J’ai longtemps utilisé Baxter of California pour le shampoing et l’après-shampoing, mais je suis passé aux Horace et ils sont super aussi. Avant, j’avais les cheveux plaqués en arrière, et j’utilisais de la Cool Grease du Japon. Je les ai coupés récemment pour ne pas avoir à les peigner chaque matin. J’utilise maintenant la cire coiffante Horace.

Tu te rases souvent ?

Je me rase une fois par semaine, à la tondeuse. Je ressemble à un gros enfant lorsque je suis rasé de près !

À quelle heure arrives-tu à la boutique ?

J’y suis vers 8h00, 8h30. Je prends le train, c’est plutôt pratique d’ici : nous sommes près de la gare, donc c’est environ 45 minutes de trajet, ce qui est bien pour Londres ! Nous ouvrons à 10h00, mais j’aime être à la boutique très tôt. J’aime mettre un peu de musique, quelque chose qu’on ne passerait pas dans la journée, et entrer en douceur dans ma journée de travail. J’aime beaucoup faire les tâches manuelles, la mise en place de la boutique : balayer devant la boutique, passer l’aspirateur, ouvrir la caisse, mettre le banc devant la boutique. J’apprécie ces éléments de la vie de vendeur !

C’est quoi, ton petit-déjeuner de choix ?

Je mange rarement pour le petit-déjeuner, pour être honnête. Parfois, je vais prendre quelque chose, mais la plupart du temps, je marche au café, trop de café. J’en bois normalement deux avant de partir de la maison. Même si je n’en ai pas besoin, je prends un café avec moi sur le chemin, parce que c’est ma routine ! Je bois la moitié du café, je vais dehors, balaye devant la boutique, rentre, bois l’autre moitié… On vient d’avoir une machine Nespresso dans la boutique aussi, et c’est dangereux. Nos clients l’adorent !

Ton travail tourne autour du contact humain. Qui sont vos clients, et comment travailles-tu avec eux ?

On a une base de clients très intéressante. Certains mecs achètent un look complet, ce sont de gros fans de Drake’s. Il y a des mecs de la City, qui viennent pour acheter trois ou quatre costumes d’un coup, et des mecs qui économisent toute l’année pour acheter une cravate ou une pochette Drake’s. Chaque client est aussi important, qu’il dépense 50 ou 10 000 livres. Les vêtements ont autant de valeur pour chacun de nos clients, et pour le mec qui s’est acheté une cravate pour son mariage, c’est plus important que tout. Nos clients sont les meilleurs, et certains d’entre eux sont devenus des amis. C’est facile, avec Drake’s : le produit est tellement bien. Je n’ai pas besoin de le vendre. Je dois juste te donner ta taille et être sûr que tu as trouvé ce que tu voulais. C’est très naturel, jamais forcé.

Il semblerait que lorsque l’on travaille avec Drake’s, on s’expose aussi à être un mannequin à mi-temps. Tu te fais souvent shooter ?

C’est vrai qu’il y a souvent des shooting avec Drake’s. J’ai souvent posé, même avant de travailler ici ! Si jamais tu as besoin d’un grand gaillard tatoué, je suis là. J’ai fait pas mal de shooting au Japon, dont un pour Wonderland Magazine où je portais pour 3 millions de livres de diamants. J’ai fait de la musique avec plusieurs groupes, alors j’ai un peu l’habitude. C’est intéressant de travailler avec des photographes différents. Mon ami Jamie Ferguson travaille souvent avec nous. On traine ensemble et il prend des photos, on peut difficilement faire plus facile ! Je viens de faire un shooting avec Fred Castleberry. Il a une approche différente, mais c’était très intéressant et sympa. Je ne suis pas persuadé d’être le sujet le plus simple à prendre en photo, mais ils arrivent toujours à obtenir un bon résultat.

Tu es souvent en costume ?

Je suis souvent en tenue assez formelle, oui. Si je passais mes journées à traîner à la maison, peut-être que ça serait différent, et je porterais plus de survêtements ! Avant j’étais assez passionné de vêtements de travail, de denim, et de pièces heritage. J’étais déjà assez fan de Drake’s, avant même de travailler avec eux. Le jour de mon mariage, je portais une chemise, une cravate et une pochette Drake’s. Comme mon uniforme quotidien est un costume, je me sens mal à l’aise quand je n’en porte pas un ! Lorsque je sors, je mets toujours une chemise et une cravate. J’ai toujours mes anciens vêtements, mais quand j’essaye de les porter je trouve que ça ne correspond plus à mon mode de vie actuel. Il y a un côté assez détendu à porter du Drake’s aussi. Leurs habits se portent aussi bien de façon formelle que de façon décontractée ! C’est très facile à porter lors d’événements ou pour sortir. Je suis récemment allé à un concert du groupe Oh Sees, je portais un costume en seersucker et je n’avais pas du tout l’impression de ne pas être à ma place, même si j’étais certainement la seule personne dans cette tenue ce soir-là !

Tant que tu ne t’es pas fait renverser de bière dessus...

On était à l’étage dans le carré VIP ! (rires)

La musique fait partie intégrante de ta vie. Dans quel type de groupes as-tu joué ?

Je jouais dans un groupe de punk hardcore qui s'appelait 33. En gros, le groupe était formé de moi et de quelques amis. On a fait ça pendant un certain temps, on a fait pas mal de tournées, on a sorti un disque, et on a fait les premières parties de certains de mes groupes préférés. Je ne pensais pas du tout que nous accomplirions autant de choses ! On a monté ce groupe pour nous. Le but n’a jamais été de monter un groupe pour avoir un énorme succès. J’ai toujours trouvé ça incroyable que l’on ait des gens qui viennent nous voir en concert et que l’on ait réussi à vendre ne serait-ce qu’un seul album. C’était génial. Je n’en attendais pas du tout autant de cette musique moche que je jouais pour mon seul plaisir.

La musique que tu nous passes aujourd’hui est assez éloignée du punk hardcore, en revanche !

J’ai toujours apprécié le jazz, même si j’en ai une connaissance très limitée. J’avais les classiques du genre, “A Love Supreme”, “Kind of Blue”, et j’ai toujours aimé écouter ça. Lors de mon dernier voyage au Japon j’ai acheté un tas de nouveaux disques, un peu par hasard. Il y a beaucoup de boutiques spécialisées à Londres aussi. Je vais souvent à “Sounds of the Universe”, c’est mon disquaire préféré. Il y a un mec qui y bosse, Alex, qui s’occupe de moi. Il fait aussi du jiu-jitsu, ce qui nous donne un point commun supplémentaire. Généralement j’y vais en disant “je voudrais tel, tel et tel disque” et il me répond “Oui, je sais, je les ai déjà mis de côté pour toi”. Il sait ce que je veux et peux me recommander des choses que je ne connais pas du tout. C’est un puits de sagesse. J’ai beaucoup de chance de le connaître. J’ai deux professeurs de jazz, lui et mon ami Tony Sylvester ! Si tu veux en savoir plus sur le New Orleans doom metal, ou le New York hardcore, je peux t’aider, mais le jazz... Je suis un néophyte, mais j’aime vraiment ça.

Tu es pour le moins tatoué. Combien as-tu de tatouages au total ?

Je n’en ai qu’un seul, il n’est tout simplement pas terminé ! (rires)

D’accord, alors quand as-tu entamé cet unique tatouage ?

J’ai commencé à l’âge de 24 ans. J’ai dû attendre que mon père soit décédé pour me faire tatouer car ça ne valait vraiment pas le coup de m’engueuler avec lui pour ça ! Fort heureusement j’étais ami avec Thomas Hooper, que j’avais rencontré à travers la musique, et sa carrière a décollé à ce moment-là, et il a pu me présenter à des tatoueurs incroyables, des personnes géniales, dont certaines sont devenues des amis proches. Tout ce que j’ai réussi à accomplir dans l’industrie du tatouage je le dois à Thomas. C’est lui qui m’a lancé. Je lui en dois une énorme pour ça ! C’est un artiste immense, complètement incroyable.

Tu fais du jiu-jitsu. Depuis quand ?

Il y a 11 ans que je pratique, mais je ne suis pas très bon. J’ai commencé à m’entraîner à Swansea avec un mec qui s’appelle Chris Rees. Il est le premier Gallois a avoir obtenu une ceinture noire en jiu-jitsu brésilien. À l’époque il n’était encore que ceinture violette, et un de mes amis, Rob, a commencé à s’entraîner avec lui. Tu sais, je suis assez corpulent. À cette époque-là c’était encore autre chose. Je devais bien peser 60 kilos de plus que maintenant et Rob m’a dit “ Je pratique ce truc-là je pense que ça te plairait beaucoup”. Il savait que j’aimais la MMA et ce genre de sports. Je suis les combats UFC depuis UFC 1. Il m’a dit “Je sais que tu adores ce genre de trucs, tu devrais venir essayer”. J’avais trop peur. Rob m’a dit qu’il y avait des cours pour débutants de prévu. Il m’a dit “On va faire des cours pour débutant sur les six prochaines semaines. Tu vas y aller, tu vas t’inscrire, et tu vas t’entraîner”. Il ne m’a pas vraiment laissé le choix, mais il avait raison : de bien des manières, le jiu-jitsu m’a sauvé la vie.

Comment ça ?

Déjà, je suis en bien meilleure santé. Je suis très dyslexique et j’ai abandonné les études en ayant le sentiment d’être incapable d’apprendre quoi que ce soit. Je n’ai pas passé le permis de conduire, par exemple. J’ai eu beaucoup de mal à l’école. Mais au jiu-jitsu j'apprenais enfin quelque chose. Et je me suis dit que si j’arrivais à faire ça, j’arriverais certainement à faire beaucoup d’autres choses ! Alors j’ai commencé à apprendre à conduire pour passer le permis. L’année dernière j’ai repris les cours pour passer un diplôme d’anglais, ce qui était assez effrayant. Tout ce j’ai accompli dans ma vie, je le dois à ce que le jiu-jitsu m’a appris. Et les gens que j’y ai rencontré sont géniaux.

Tu t’entraînes combien de fois par semaine ?

En ce moment beaucoup trop rarement, mais je suis très pris par Drake’s. Ça se compte plutôt en nombre d’entraînements par mois ! Il faut vraiment que je change cela, d’ailleurs. Mon maître, Mauricio Gomes, est au Brésil pour trois mois. Tu sais, “maître”, ça n’est pas un mot que j’utiliserais pour beaucoup de personnes. Mon ami Miles m’a dit une fois “Aucun homme adulte n’a besoin d’un maître”, et j’étais plutôt d’accord avec lui jusqu’au jour où j’ai rencontré Mauricio. C’est mon maître de jiu-jitsu. À son retour je m'entraînerai plus intensivement. J’aimerais faire quelques combats et surtout obtenir la ceinture marron !

Où t’entraînes-tu ?

Mon maître Mauricio est le père de Roger Gracie, qui, à mon avis, est le meilleur combattant de tous les temps. Quand je m’entraîne avec Mauricio, je vais à la Roger Gracie academy, qui se trouve à White City. Je m’entraîne aussi parfois à Soho avec un mec qui s’appelle Sacha.

On sent que tu aimes vraiment ce que tu fais. Tu arrives à couper avec le travail ?

En théorie je ne travaille que cinq jours par semaine. Parfois ça déborde un peu, notamment lorsqu’on a des malles ouvertes ou des événements. Des fois il faut travailler un peu plus, mais je le fais avec grand plaisir. Drake’s est un excellent employeur, alors j’essaye d’être un excellent employé !

À ton avis, qu’est-ce qui fait la popularité actuelle de Drake’s ?

Drake’s est très populaire en ce moment. Le marketing de Drake’s est extrêmement bien exécuté : le concept de la marque est présenté à merveille. Avant de travailler pour eux, j’étais comme beaucoup d’autres mecs à regarder leur page Instagram en me disant que j’aimerais bien porter cette cravate et être à Florence moi aussi. Tu peux donc comprendre à quel point je suis fier de travailler pour eux. Le but c’est de faire des bons produits, correctement. Michael et moi approchons le travail de la même manière et cela fait partie des raisons pour lesquelles j’aime autant travailler chez Drake’s !

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